Chapitre 2 : Un deuil particulier

Ce que l’on pense, ce que l’on ressent

Je suis passée par là
Isabelle parle des choses à ne pas dire à une personne en deuil et de la façon de la soutenir.(3:22)Video transcript
Isabelle raconte le moment difficile où elle a annoncé à son fils le décès de sa sœur.(3:22)Video transcript

Pardonnez-vous tout moment où vous n’avez pas pu lui donner du soutien, en vous rappelant que personne n’a qu’une quantité illimitée d’énergie et de patience. J’étais tellement en colère contre lui quand il est mort. Comment était-ce possible? Je n’ai pas pu m’empêcher de le blâmer, ce qui m’a causé encore plus de souffrances. L’inquiétude m’habitait constamment et je m’attendais toujours à recevoir l’appel fatidique. Aujourd’hui, je ressens un étrange soulagement de savoir qu’elle n’est pas en danger.

Vos sentiments du vivant de la personne vous accompagneront sans doute dans votre deuil. Il se peut aussi que d’autres fassent surface et qu’ils soient intenses, difficiles à comprendre ou troublants. Tous ces sentiments sont normaux, même ceux qui sont les plus difficiles à reconnaître ou à accueillir.

Voyez quelques exemples en cliquant ci-dessous.

  • D’avoir ignoré que la personne avait des problèmes de consommation.
  • De ne pas être intervenu.e davantage.
  • D’avoir exprimé de la colère à l’endroit de la personne décédée.
  • D’avoir contribué à sa consommation ou de l’avoir encouragée à consommer.
  • De lui avoir demandé de partir ou d’avoir mis fin à votre relation.
  • À cause de tout ce que la personne a enduré : maladie, conditions de vie, isolement, pauvreté ou mauvais traitements.
  • À cause des circonstances qui ont mené aux problèmes de consommation.
  • À cause du temps ensemble dont vous avez été privés et de la perte des possibilités pour l’avenir.
  • D’avoir pensé que si la personne faisait une surdose, sa souffrance et ses difficultés — ou les vôtres — seraient finies.
  • De vous faire juger pour vos actions, vos paroles ou ce que vous auriez dû dire ou faire.
  • Des jugements que vous portez sur vous-même ou sur la personne décédée.
  • De ne pas avoir mis la famille et les amis au courant des problèmes de consommation par peur du jugement ou de la stigmatisation.
  • Que les souffrances de la personne — et/ou les vôtres — soient finies.
  • Que vous n’ayez plus à vous gérer des situations de crise liées à la santé ou à la consommation de la personne.
  • De ne plus avoir à craindre l’appel fatidique ou qu’il arrive malheur à la personne.
  • Pour toute l’inquiétude, l’anxiété et la fatigue que vous a causées la personne à cause de sa consommation.
  • Parce qu’après toutes ces années à vous battre pour la personne, elle est morte quand même.
  • Parce qu’à cause de la stigmatisation des problèmes de consommation, les autres ne semblent pas accorder d’importance à la vie de la personne décédée et minimisent ou refusent de reconnaître votre deuil.
  • Parce que les services offerts aux personnes aux prises avec des problèmes de consommation sont insuffisants.
  • Par rapport aux circonstances du décès : la personne est-elle morte seule, a-t-elle eu mal ou peur?
  • D’avoir retiré de l’énergie des efforts déployés pour améliorer la vie de la personne.
  • Si la personne consommait depuis longtemps, la compassion que vous avez pour ses difficultés côtoie peut-être de la frustration, du ressentiment et de la colère. 
  • Si la personne consommait pour la première fois ou depuis peu, vous êtes peut-être sous le choc et incrédule tout en ressentant de la culpabilité, des regrets et de la honte.

Quelques idées...

  • Accueillez vos émotions, même si elles sont douloureuses ou troublantes. Leur fréquence et leur intensité s’atténueront vraisemblablement avec le temps et du soutien. Elles ne disparaîtront peut-être jamais complètement, et c’est peut-être ce que vous souhaitez, ce qui est tout à fait acceptable.
  • Réfléchissez aux particularités ou aux difficultés de la relation qui vous unissait à la personne décédée, et à leurs impacts possibles sur votre deuil.
  • Si vous avez du mal à comprendre ce que vous ressentez, dites-vous que c’est normal. Il est possible de ressentir une profonde tristesse, mais aussi de la colère, du soulagement ou même l’absence de toute émotion.
  • Demandez-vous s’il y a des choses qui ne vous manquent pas. Vous pourriez ressentir du soulagement de ne plus avoir à vous en faire ou à vous sentir responsable, et peut-être aussi de la culpabilité devant ce soulagement. N’oubliez pas que tout ça fait partie du processus normal du deuil.
  • Parlez de vos pensées et émotions avec des personnes bienveillantes. Tournez-vous vers des gens (famille, amis, chef spirituel) qui vous écouteront sans vous juger ni vous donner des conseils non sollicités. Songez à vous joindre à un groupe de soutien pour les personnes dont un proche est décédé à cause de problèmes de consommation. 
  • Si vous avez l’impression de vous enliser dans vos pensées ou émotions, allez chercher de l’aide professionnelle. Le counselling peut vous donner des stratégies précises pour gérer les pensées nuisibles. 

Un mot sur le deuil et la dépression

Il n’est pas toujours facile de distinguer le deuil d’une dépression clinique. Il est important d’être à l’affût des signes. Parfois, les difficultés du deuil provoquent un déséquilibre chimique dans le cerveau qui peut mener à la dépression. Non traitée, la dépression peut compliquer le deuil encore plus.

Si une personne endeuillée tarde à reprendre goût à ses activités quotidiennes, dit qu’elle aurait dû mourir aussi, exprime du désespoir ou juge que ça ne vaut pas la peine de vivre, il est important d’obtenir de l’aide médicale. Si vous ou un de vos proches pensez à vous faire du mal ou à faire du mal aux autres, ou sentez que vous êtes en état de crise, communiquez avec votre centre de crise local (voir la section des ressources).

Ressources utiles

MonDeuil.ca – Comprendre les émotions intenses