Chapitre 2

Comment les gens affrontent leur culpabilité

Voici trois cas de personnes endeuillées face à leur culpabilité. En les lisant, demandez-vous si certaines de leurs méthodes d’adaptation pourraient vous être utiles.


L’histoire d’Hélène

« J’aurais dû insister pour que nous parlions de son décès. Je sentais qu’il souffrait beaucoup. Chaque fois que j’essayais d’amener le sujet, il mettait fin à la conversation. Même si je sais qu’il n’a jamais été porté à parler de ses émotions, je suis convaincue que si j’avais pu trouver les bons mots, j’aurais peut-être réussi à établir un contact avec lui.

Quelqu’un m’a déjà dit qu’on meurt comme on vit. Si mon père n’était pas bavard avant, pourquoi aurait-il changé juste avant de mourir?

Plus j’y pense, plus je me rends compte que mon père préférait peut-être me cacher ses émotions. Il voulait être fort et stoïque jusqu’à la fin, à l’image d’un père. Il a perdu beaucoup de choses au cours de sa maladie, et c’était une des seules choses qu’il pouvait encore maîtriser. Quand je pense à papa et à ce qui motivait son comportement, je vois bien que j’ai fait tout ce que je pouvais et que cette décision lui appartenait. Comme ça, je me sens moins coupable. »

L’histoire de Michel

« Au début de sa maladie, je lui avais promis que nous resterions à la maison jusqu’à la toute fin. Vers la fin, j’étais brûlé : je me levais plusieurs fois par nuit et je faisais toutes sortes de tâches que je n’aurais jamais imaginées pour le soigner. Quand l’infirmière m’a téléphoné pour me dire qu’il était temps de l’amener à l’hôpital, je savais, au fond, qu’elle avait raison. Mais il était très fâché. Il aimait beaucoup notre maison, et je pense qu’il se sentait en sécurité au milieu de ses affaires.

Je me dis parfois que j’aurais pu en faire plus, tenir mon bout plus longtemps, insister davantage auprès du personnel soignant… tout cela pour tenir ma parole et ne pas ressentir cette culpabilité qui m’écrase.

 Nous avons pris des décisions en fonction de l’information que nous avions. Nous ignorions tous les deux que ce serait si difficile et que nous aurions tant besoin d’aide. Nous avons été confrontés à des forces bien plus puissantes que nous et nos plans idéalistes du début. »

L’histoire de David

« Je n’étais pas présent au moment où elle est morte. J’étais épuisé. J’avais désespérément besoin de dormir. L’infirmier m’avait dit que son état était stable. Bien sûr, il m’avait prévenu que la situation pouvait changer n’importe quand et se détériorer rapidement. J’ai pris le risque. J’ai l’impression de l’avoir trahie à l’heure où elle avait le plus besoin de moi.

Il faut parfois que je me rappelle quelques faits. Pour commencer, je suis humain. Je ne peux pas prévoir l’avenir, et c’est trop facile de m’en vouloir pour une décision que j’ai prise sous la contrainte.

Bien sûr que je voulais être là. Mon absence n’a rien à voir avec ce que je voulais vraiment. Et évidemment, ce n’est pas la première fois qu’une chose ne se passe pas comme je l’avais prévu. Je sais aussi, au fond de mon cœur, que ma relation va bien plus loin que ma seule présence au moment de son décès. Je refuse de laisser ce seul moment définir notre relation pour le reste de ma vie. »

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